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Contrats d’hypothèque immobilière de type parapluie – Des lacunes importantes sur le plan de l’information !

Montréal, le 19 février 2018 – Avez-vous une hypothèque? Si oui, contient-elle une clause parapluie ? Si vous êtes incapable de répondre à cette dernière question, n’en soyez pas surpris. Selon l’étude réalisée conjointement par Option consommateurs et la professeure Marie Annik Grégoire, de l’Université de Montréal, les consommateurs sont mal informés lorsque vient le temps souscrire à une hypothèque. « Il leur est pratiquement impossible de connaître leurs obligations avant d’être chez leur notaire pour signer l’acte hypothécaire, dit Me Grégoire. Or, à cette étape, ils ne peuvent plus reculer sans s’exposer à de graves conséquences juridiques. Ils sont en quelque sorte pris au piège. »

Les hypothèques parapluies – c’est notamment ainsi que l’on appelle les hypothèques contenant une clause parapluie – sont autorisées au Québec depuis 1994. Contrairement aux hypothèques traditionnelles, qui ne couvrent que le montant du prêt nécessaire pour l’achat d’une maison, elles garantissent aussi les autres dettes que le consommateur (ou son conjoint, s’il est copropriétaire) a contractées ou contractera auprès de la même institution financière. « Il s’agit d’un produit extrêmement risqué, dit Mme Maryse Guénette, directrice, recherche et représentation, à Option consommateurs. Il peut empêcher le consommateur de changer de prêteur au moment de renouveler son hypothèque ou d’obtenir sa quittance même après avoir fini de payer sa maison. Il peut aussi l’obliger à payer les dettes de son conjoint. »

 

Dans le cadre de l’étude intitulée « Contrat d’hypothèque immobilière de type parapluie. Les consommateurs sont-ils bien informés? », Option consommateurs a enregistré (ou fait enregistrer), à l’insu des institutions financières, les conversations que des consommateurs contractant une hypothèque ont eues avec le représentant de leur institution financière au moment de la signature de leur contrat hypothécaire. « Nous voulions vérifier si l’information transmise par les institutions financières permet au consommateur d’être en mesure de connaître la nature et la portée de son engagement hypothécaire, dit Mme Guénette, et, ce faisant, de faire un choix éclairé. »

 

L’analyse des données a été effectuée par la professeure Marie Annik Grégoire. Et les résultats sont alarmants.

Bien que l’enquête se soit déroulée dans cinq institutions financières différentes, le canevas de chaque rencontre a été le même. « Cela indique une forte standardisation des pratiques », dit Me Grégoire.

 

Tous les participants ont obtenu une hypothèque parapluie.

Les modalités du prêt ont été correctement transmises, mais d’importantes lacunes ont été observées. Ainsi, la portée « rechargeable » qui caractérise cette garantie hypothécaire n’a jamais été clairement expliquée aux participants.  Pire : un représentant a affirmé que le produit qu’il proposait ne couvrait que le prêt d’achat de l’immeuble, alors que cela était faux. « Peu d’employés semblaient connaître les caractéristiques de l’hypothèque parapluie », dit Me Grégoire.

 

D’autres lacunes sont en lien avec la remise de l’acte hypothécaire – aucun participant n’a pu le lire avant de le signer –, et la vente d’assurance – en cette matière aussi, on a omis des renseignements importants. Pire encore : on a incité deux consommateurs à fournir une fausse information.  Dans un cas, on a invité un consommateur à répondre « non » plutôt que « oui » à une question sur son état de santé; dans un autre, on a proposé à un consommateur d’interpréter très largement une question sur son état de santé afin de « ne pas avoir à aller chercher un rapport du médecin ». De tels gestes peuvent avoir de graves conséquences au moment de faire une réclamation. En effet, « une fausse déclaration peut entraîner la nullité du contrat d’assurance et le refus de l’assureur d’indemniser le consommateur », dit Me Grégoire.

 

Notons qu’il s’agit de la deuxième étude qu’Option consommateurs réalise sur l’hypothèque parapluie. La première, qui avait été financée par le Bureau de la consommation, avait permis de constater que les consommateurs qui détenaient une hypothèque parapluie ne le savaient pas – et que la plupart n’en auraient pas voulu. Celle dont il est question ici, qui a été financée par la Fondation Claude Masse, permet de découvrir que, s’ils ne savent pas que leur contrat hypothécaire contient une clause parapluie, c’est qu’on ne leur dit pas.

Notons également que la France a interdit l’hypothèque parapluie depuis 2013. « Ce produit a vite été considéré comme trop toxique en ce qu’il favorisait grandement le surendettement du consommateur », dit Me Grégoire.

 

À défaut de proposer aux législateurs de suivre l’exemple de la France, Option consommateurs et la professeure Marie Annik Grégoire recommandent :

 

Aux gouvernements fédéral et provincial :

  • d’obliger les institutions financières à offrir également à leurs clients des hypothèques traditionnelles, à les informer adéquatement sur la nature du produit qu’elles leur proposent et de s’assurer qu’ils ont bien compris;
  • de mettre en place un système d’inspection assujetti de sanctions pénales.

Au gouvernement du Québec :

  • de soumettre les contrats hypothécaires entre une institution financière et un consommateur à la Loi sur la protection du consommateur.

Aux institutions financières :

  • de faire connaître aux consommateurs la fonction de vente de leurs « conseillers » et les incitatifs à vendre des produits d’assurance;
  • de s’assurer que leurs représentants soient adéquatement formés sur la nature des contrats d’hypothèque;
  • de s’assurer de rédiger leurs contrats hypothécaires dans un langage clair.

Aux consommateurs :

  • de se renseigner sur le type de contrat hypothécaire que propose l’institution financière et de le lire attentivement avant de conclure la transaction chez le notaire;
  • d’éviter, dans la mesure du possible, de souscrire d’autres prêts auprès de l’institution financière afin que toutes leurs nouvelles dettes ne soient pas garanties par l’hypothèque sur leur maison, à moins que ce ne soit leur souhait (en attendant que les choses changent, c’est la meilleure manière de se protéger).

 

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Pour information :

Option consommateurs : 514 777-6133, etheriault@option-consommateurs.org

Marie Annik Grégoire, 514 343-7203, marie.annik.gregoire@umontreal.ca