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Assurer la participation des consommateurs au processus de réglementation des aliments et cultures issus du génie génétique au Canada

Le processus de réglementation canadien des aliments et cultures issus du génie génétique possède des forces et des faiblesses. Tout comme ceux des États-Unis, des pays de l’Union européenne, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande, il peut être amélioré en matière de transparence, d’information et de participation du public. En effet, les consommateurs et leurs représentants expriment, notamment dans le cadre de groupes de discussion, un manque de confiance et des préoccupations profondes à ce sujet.

Le manque d’information et d’outils pour comprendre et maîtriser l’ensemble des enjeux et pouvoir participer adéquatement au processus de réglementation compte au nombre de ces préoccupations. Peu des consommateurs rencontrés connaissaient précisément le processus de réglementation canadien et ses acteurs.

Beaucoup d’entre eux manifestaient également des frustrations quant au manque de capacité à cerner l’ensemble des enjeux liés à l’approbation d’un OGM. Il convient donc de commencer par donner des outils aux consommateurs, leur donner du matériel à réfléchir. Alors que les OGM sont de plus en plus présents dans les champs et dans les assiettes et que la nécessité de réglementer leur utilisation se fait pressante, le citoyen-consommateur semble être sans voix. Il doit pourtant pouvoir intervenir sur les décisions, directement ou indirectement.

À cette fin, organiser davantage de débats publics et publier toutes les études dont disposent les ministères constitueraient des pistes de solutions. Il est de mise de croire que les autorités réglementant les aliments et cultures issus du génie génétique prennent des décisions informées et qu’elles possèdent tous les renseignements nécessaires afin de les justifier. Il doit en être de même pour les consommateurs canadiens.

Par exemple, lors de la publication d’un avis de demande d’approbation, ces derniers doivent être informés, de l’emplacement des sites d’expérimentation ainsi que les municipalités concernées. Le document de décision finale devrait quant à lui décrire les mesures prises pour limiter les effets néfastes et pour traiter les résidus de l’OGM ainsi que le plan de contrôle des effets et le plan d’action d’urgence.

D’une façon générale, toute démarche d’information et de participation du public devrait être conduite sous un angle de transparence et de sensibilisation. À la lumière des propos des consommateurs rencontrés, la participation du public devrait également être indirecte : outre la participation directe des consommateurs dans le cadre des deux périodes de commentaires public de 60 jours et de la tenue d’audiences publiques, les citoyens souhaitent être représentés par des représentants pouvant consacrer du temps et des ressources à cette fin, comme les organismes de défense des consommateurs et les associations environnementales. Ceux-ci devraient être systématiquement informés de la réception d’une demande d’approbation par l’entremise d’un envoi par liste électronique.

Bien que les préoccupations prioritaires des consommateurs soient liées à la santé et l’environnement, l’éthique et les impacts sociaux-économiques des OGM évalués figurent également au nombre de leurs inquiétudes. Ainsi si le processus de réglementation doit impliquer un comité d’experts scientifiques, il doit aussi laisser la place à deux comités consultatifs supplémentaires dédiés à ces deux enjeux.

Le travail du comité sur les enjeux socio-économiques permettrait d’intégrer des questions non scientifiques importantes liées à l’approbation d’un produit GM telles que l’utilité de l’OGM pour l’agriculture et la société versus ses dangers potentiels, les impacts de la brevetabilité d’une semence et d’une espèce (droits de propriété intellectuelle sur une semence), les répercussions de la décision sur la qualité de vie des consommateurs et des animaux, l’intégrité et connaissance de la source alimentaire, les incidences sur l’agriculture, les incidences environnementales, la liberté de choix des consommateurs, la liberté de choix des agriculteurs, les répercussions sur l’agro-industrie, les incidences sur l’emploi, la pérennité des collectivités, les répercussions sur les pratiques commerciales des autres pays, le respect ou l’entrave au développement durable.

De la même façon, le travail du comité consultatif sur l’éthique permettrait, en tenant compte de la diversité des cultures et des régimes alimentaires des Canadiens, d’évaluer les valeurs et objectifs de l’aliment et de la nourriture, la valeur, le rôle et les bienfaits de l’agriculture dans notre société, la diversité et l’indépendance des agriculteurs.

Afin de s’assurer de leur application, ces structures et mécanismes supplémentaires devront faire l’objet de dispositions juridiques qui s’inséreront dans les procédures actuelles par des amendements aux lois existantes. Le contexte paraît favorable : nombre de lois relatives à la santé et l’alimentation, incluant la Loi sur les aliments et drogues, sont en cours de révision par Santé Canada dans le cadre du Renouveau législatif.

D’une façon générale, les consommateurs privilégient une approche réglementaire s’inspirant du principe de précaution plutôt qu’avec l’équivalence substantielle. Cela rejoint leur désir d’être informé de la présence des OGM dans les aliments grâce à un étiquetage systématique de leur présence.

Nos 21 recommandations se veulent constructives, réalistes et applicables. Elles s’inscrivent dans la continuité du travail effectué depuis plusieurs années par Santé Canada, l’ACIA et Environnement Canada, notamment par l’entremise des projets-pilotes, pour améliorer l’information et la participation du public dans le processus de réglementation.