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Les mécanismes de règlement des différends proposés par les plateformes de l’économie du partage. Des outils efficaces pour l’accès à la justice?

Les plateformes numériques de l’économie du partage (PNEP) sont de plus en plus souvent utilisées, et ce, dans différents domaines. Il est donc important de se pencher sur les recours dont disposent les consommateurs lorsque survient un problème. C’est ce que fait notre recherche en étudiant, d’une part, l’application, dans les conventions d’utilisation des PNEP, des mesures d’équité et de transparence prévues par le cadre juridique canadien en matière de consommation pour faciliter l’accès des consommateurs à la justice, et en s’intéressant, d’autre part, aux perceptions et aux expériences des consommateurs au sujet des mécanismes de règlement des différends qui leur sont offerts.

Notre analyse est basée sur la mise en relation de la dimension objective de l’accès à la justice, que nous relions au contrat, et de sa dimension subjective, que nous relions à l’expérience et aux perceptions des consommateurs. Elle permet à notre recherche d’apporter un éclairage sur les écarts entre l’offre de justice des PNEP et le sentiment d’équité et de compétence des utilisateurs. Par ailleurs, elle répertorie les obstacles potentiels à l’accès à la justice, issus de notre analyse documentaire, et révèle les obstacles réels rencontrés par les participants à notre recherche.

L’analyse des conventions de dix plateformes d’économie du partage a révélé la présence de clauses susceptibles de limiter l’accès à la justice. Il s’agit des clauses d’élection de for, qui déterminent à l’avance le forum compétent en cas de litige, des clauses d’arbitrage obligatoire et des clauses de renonciation à l’action collective. De plus, nous remarquons que les mécanismes internes ou le recours à l’émetteur de carte de crédit – ce sont ces recours que les participants avaient utilisés – offrent parfois une réparation partielle du fait qu’ils ne donnent pas la possibilité de réclamer la valeur du préjudice subi, le cas échéant ; ils limitent donc souvent les recours à la résolution et à la résiliation du contrat. Malgré cela, les participants semblaient satisfaits de leur expérience.

Auraient-ils été mieux servis en matière d’équité s’ils avaient utilisé des mécanismes externes tels que la médiation et l’arbitrage, ou encore s’ils s’étaient adressés au tribunal ? Notre étude des lois de protection des consommateurs du Québec, de l’Ontario et de la Colombie-Britannique ainsi que de la jurisprudence nous permet d’en douter.

Sur le plan de la transparence, l’analyse a permis de constater un manque de clarté dans l’information offerte ainsi qu’une tendance à présumer du consentement du consommateur qui utilise la plateforme ou achète le service, ce qui induit, chez les participants, une méconnaissance de leurs droits et de leurs recours. Cette méconnaissance fait partie des barrières à l’accès à la justice auxquelles s’ajoutent le manque d’orientation, la réparation incomplète et la non-utilisation des certains recours, qui peut être en lien avec la barrière des coûts. Pour leur part, les répondants ont fait état de difficultés techniques et du mal qu’ils avaient eu pour trouver de l’information ou parler à quelqu’un.

Finalement, les obstacles à l’accès à la justice en matière d’économie du partage s’avèrent être la complexité des mécanismes de règlement des différends et l’accès à l’information.