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2 décembre 2025

« Bon », « très bon », ou « excellent »? Les consommateurs et l’encadrement du pourboire au Canada

Depuis la pandémie, avec l’intensification de l’utilisation des terminaux de paiement et la montée en flèche de l’inflation, le pourboire est devenu source de nombreux mécontentements pour les consommateurs canadiens.

En groupes de discussion, les consommateurs rapportent que le pourboire est demandé trop souvent et presque partout. Ils sont irrités par sa sollicitation dans les interfaces de paiement, notamment en raison des montants élevés proposés par défaut et des messages persuasifs qui accompagnent les options de pourboire (« bon », « très bon », « excellent »).

À leur avis, ces stratégies de sollicitation visent à influencer leur processus décisionnel. En particulier, l’application des pourcentages de pourboire sur les taxes suscite des frustrations.

Plusieurs consommateurs regrettent également de devoir compenser les faibles salaires des employés à pourboire. Enfin, ils considèrent que le pourboire peut peser lourd sur leur portefeuille et s’attendent depuis longtemps à sa réglementation.

Malgré ces enjeux, le pourboire ne fait guère l’objet d’encadrement du point de vue du consommateur au Canada, à l’exception notable du Québec, qui a adopté des normes visant à assurer la neutralité des propositions de versement de pourboire. 

Ces nouvelles normes interdisent que les options de pourboire prédéterminées soient calculées sur le montant après taxes. Elles exigent que les options prédéterminées de pourboire soient présentées de manière uniforme, et qu’une option permettant de personnaliser le montant soit affichée. 

En outre, la nouvelle réglementation interdira l’ajout d’émojis, d’adjectifs ou d’autres messages aux côtés des options de pourboire proposées.

À l’étranger, bien qu’on trouve peu de normes de protection du consommateur en matière de pourboire, trois pays peuvent inspirer les législateurs canadiens. Au Royaume-Uni, un code de meilleures pratiques prévoit l’affichage d’avis dans les commerces pour informer les consommateurs de la destination et de la distribution du pourboire.

En Suisse, le pourboire doit être inclus dans le prix du service et le commerçant ne peut demander un pourboire en sus de ce prix. En Colombie, les commerces ne peuvent proposer de verser un pourboire s’élevant à plus de 10 % du prix du service et doivent afficher une « politique sur les pourboires » dans leurs établissements, indiquant le caractère discrétionnaire de la pratique.

L’analyse des interfaces de paiement au Canada permet de conclure qu’une législation encadrant la sollicitation du pourboire par les commerçants pourrait être mise en place relativement rapidement. La configuration des systèmes de point de vente qu’utilisent plusieurs commerçants inclut déjà un large éventail de paramétrages, allant de la désactivation de la demande de pourboire à l’affichage d’options avant ou après taxes, en passant par le choix des montants et des pourcentages affichés.

En conclusion, Option consommateurs émet des recommandations visant à protéger le libre choix des consommateurs et à garantir la transparence de la pratique. L’organisme propose aux gouvernements fédéral et provinciaux de limiter les commerces autorisés à solliciter activement un pourboire, de réglementer l’affichage des informations sur les terminaux de paiement et les plateformes en ligne, et d’exclure les taxes de toute option de pourboire calculée en pourcentage du prix.

Option consommateurs suggère également d’afficher un avis dans les commerces, indiquant à qui est remis le pourboire versé par le consommateur et précisant son caractère entièrement discrétionnaire.